Dracula Trail
J'en parlais dans mes deux dernières entrées : ça vaut bien une carte. D'autant que ça fait beaucoup trop longtemps que je n'ai pas alimenté cette rubrique, qui souffre de la concurrence de sa rivale quotidienne - mais bon, m'y revoici. Et voici donc la ville de Whitby :
North York Moors, Eastern Area, Ornance Survey, Outdoor Leisure 27, 1993.
Taille originale de l'extrait : 16cm, soit 4km.
Centre de l'image : 54°28,5'N, 0°36,4'W.
L'abbaye se trouve sur la rive droite de la rivière Esk, sur le petit promontoire qui surmonte le port et la mer, tout près du centre-ville en effet (les quadrillages bleus sont espacés d'un kilomètre). On ne distingue pas bien les altitudes, les courbes de niveau étant très serrées le long de la côte ; cependant, la cote portée à côté de l'abbaye est de 58 mètres. La falaise fait donc ses cinquante mètres, ce qui commence à être respectable.
Un chemin côtier part du port pour rejoindre l'abbaye puis longer le bord de la falaise : le Dracula Trail - tout ça parce que, comme vous l'avez lu peut-être dans mon entrée de jeudi soir, c'est à Whitby que Bram Stoker fait débarquer le vampire Dracula sur les côtes anglaises... Je ne sais rien des liens qu'avait Bram Stoker avec Whitby, pas plus que de ceux de Gaston Leroux avec Perros-Guirec, où se déroule le chapitre VI du fantôme de l'Opéra. Une différence : Stoker connaissait manifestement fort bien Whitby, comme le montre la description dont je donnais un extrait ; pour Leroux et Perros, c'est beaucoup moins clair : quand on connait les lieux, on n'e s'y retrouve pas, rien ne colle, ou alors très approximativement... À mon avis, rien là dedans qui ne soit sorti d'un atlas et d'une quelquonque carte postale - en noir et blanc bien sûr, ce qui explique que l'église de Perros (entièrement de granit rose) soit affligée d'une blancheur sépulchrale.
Qu'en déduire ? Que Stoker et Leroux, quoi que de la même génération, n'ont pas le même rapport au paysage, simple décor pour l'un, allégorie en dimension réelle pour l'autre ? Ou bien, tout simplement, que Leroux n'est qu'un feuilletonniste qui tire à la ligne, alors que Stoker est un vrai écrivain. Ou encore que Bram Stoker pratique, dans cette description, le dédoublement narratif cher à Conrad : c'est Mina Murray, son personage, qui est censée écrire cette description ; on y trouve donc tout un état d'esprit, qui est celui du personnage-narrateur et non de l'auteur.
Question : le fait d'avoir diné chinois avec une pleine tablée de spécialistes des littératures de langue anglaise m'a-t-il exposé à la contagion ?