Cartes sur table

Le Plume : département des cartes et plans

22 octobre 2006

Insulaire caldera

Les volcans, même sur les cartes, c'est impressionnant. Il y a les cônes stromboliens parfaitement réguliers, comme le mont Fuji, dont la régularité même est une aberration cartographique. Il y a aussi les volcans irréguliers, avec leurs cratères et calderas multiples, résultat d'autant d'explosions : c'est le cas du volcan Kartala à Ngazidja, la Grande Comore.


Carte routière au 1:50.000, Archipel des Comores : Grande Comore, IGN, 1995.
Taille de l'extrait : 20,5 cm soit 10,2 km.
Centre de l'image : 11°45,7' S, 43°23,2' E.

2361m, qu'il culmine, l'animal. C'est pas énorme, sauf que la mer (qu'on distingue dans le coin près du village de Tsangadjou) est à moins de dix kilomètres. On note la densité des courbes de niveau, 20m de dénivelé chacune... L'autre grande île de l'archipel, Mayotte, a une toute autre physionomie avec ses altitudes modestes (500m et quelques il me semble) et son vaste lagon.

Autre île, autre culture, autre nationalité aussi - un referendum de 1974 avait décidé l'indépendance des Comores mais le « non » l'avait emporté à Mayotte. Le gouvernement français de l'époque (Chirac était premier ministre, déjà) décida donc que la validité du referendum devait être interprétée île par île, ce qui n'était pas prévu avant le vote, et Mayotte resta française. En dépit des protestations des Nations Unies qui considèrent que changer les règles du jeu comme ça, ça ne se fait pas. Si on ne peut même plus bricoler, de nos jours...

15 octobre 2006

Les trois directions de Manhattan

L'affaire est entendue : New York est une ville à trois dimension, une « ville debout ». On le dit, on le répète - c'est vrai par endroit : le financial district tout en bas de l'île de Manhattan, au niveau de Midtown, Time Square et l'Empire State Building et puis, ponctuellement, de part et d'autre de Central Park. Le reste de New York n'est guère plus élancé dans les airs que n'importe quelle grande ville, finalement.

Par contre, Manhattan connait trois directions : uptown, vers le nord-est et le Bronx, downtown dans la direction opposée, vers la pointe de l'île, et crosstown, vers le côté de Manhattan où vous n'êtes pas. On dit que les New-Yorkais de l'East Side prennent plus volontier un avion pour Chicago qu'un bus pour le West Side, et réciproquement...


Manhattan Bus Map, New York City transit, février 2004.
Taille de l'extrait : 15 cm, soit 3,9 km.
Centre de l'image  : 40°45,28' N, 73°58,16' W.

D'ailleurs, le plan de bus de Manhattan est très officiellement muni de cette rose des vents. Et l'on note que les moyens de transports permettent essentiellement de circuler sur l'axe uptown-downtown et beaucoup moins dans le sens crosstown. Pendant mon bref séjour new-yorkais, j'ai fait pas mal de kilomètres à pieds - soit uptown, soit downtown, jamais crosstown. New York est comme ça.

C'est ce que rappelait un journaliste de CNN l'autre soir (CNN était en panic mode ce qui permettait d'avoir le vrai contenu de CNN et non la soupe usuelle délayée de longuissimes spots pour les vacances en Egypte ou Thai Airwais qu'est CNN international) pour expliquer sa mauvaise connaissance de l'East Side. C'est là en effet qu'un joueur de l'équipe de baseball des Yankees au commandes d'un avion de tourisme en perdition n'avait pu éviter de rencontrer la verticalité de l'Upper East Side, une tour d'appartement de 50 étages, Yorktown Avenue & East 72 Street.

Et les New-Yorkais ce sont retrouvé plongés dans le jour où tout au bout du Lower West Side on avait cru pouvoir tuer leur ville, où on a tué 6000 d'entre eux. Mais New York est toujours là.

08 octobre 2006

Danakil

Sur le nord de la corne de l'Afrique, bien loin du cap de Bon-Espérance, on trouve un des paysages les plus désespérés de la surface de la Terre : le désert des Danakils. Je n'y ai jamais mis les pieds ; je me contente de la carte et des bandes dessinées d'Hugo Pratt !


International Travel Maps : Ethiopia (1:2.000.000)
Taille de l'extrait : 19 cm, soit 380 km.
Centre de l'image : 12°26' N, 40°50' E.

À l'ouest, les crêtes montagneuses du Tigray, avec ses sommets à plus de 4500 m et son haut plateau entre 1000 et 2000 m - l'un des foyers historiques du christianisme ethiopien. À l'est, la mer rouge, bordée par la chaîne modeste mais significative des « alpes danakil » - dont je ne pense pas qu'elles évoquent les pâturages helvétiques. Entre les deux, la dépression Danakil : des roches souvent nues, parfois couvertes de dépôts de sel, en dessous du niveau de la mer, sans aucun vent... Inutiles de dire que les températures battent des records.

Au sud, un peu en dessous de l'extrait, une barre montagneuse ferme ce triangle aride : les montagnes de Harar. Et en plein milieu, au nord de Serdo, sur la route nationale n°18, des anthropologues amateurs des Beatles avaient exhumé les restes d'un squelette vieux de trois millions d'années : Lucy.

01 octobre 2006

Bonne-Espérance

Une partie de ma cartothèque dont je suis assez fier : un lot de cartes d'Afrique du Sud, publiées par la direction générale de la topographie, au Cap. Des cartes de bonne qualité, plutôt bon marché ; non pliées, par ailleurs : je les garde dans un grand carton à dessins.


Carte d'Afrique du Sud au 1:250.000 : feuille 3318, Cape Town.
Taille de l'extrait : 18 cp, soit 35 km.
Centre de l'image : 34°6' S, 18°30' E.

Le Cap de Bon-Espérance : on le sait, ce n'est pas l'extrémité Sud du continent africain ; l'autre côté de la baie False est elle-même plus méridionale ; en suivant la côte vers l'Est, le cap Agulhas, ou cap des Aiguilles, est 45 km plus au Sud. Symboliquement, cependant, c'est Bon-Espérance qui marque la limite de l'océan atlantique et de l'océan indien, marqué par la montagne de la Table et ses prolongements. Sur la côte Est de la montagne de la Table, Wynberg, la montagne du vin : Bougainville disait grand bien du blanc liquoreux du Petit Constance - dont on a d'ailleurs repris la production, pas mauvais, le Klein Konstantia.

À l'Est de la baie False, en dehors donc de cet extrait, c'est Hottentots Holland : les hautes terres des Hottentots, qui, se prolongeant jusqu'à la mer, marquaient la limite orientale de l'enclave hollandaise du Cap. Entre celles-ci et la montagne de la Table, ce sont les Cape Flats, plaine de sable battue par les vents. Sur la côte nord de la baie False, on voit les réalisations démentielles des années 1980 : les quartiers géants de Mitchell's Plain, pour les Cape Coloured, descendants lointain des « Hottentos » et des premiers colons ; Mandalay, l'enclave de Mitchell's Plain réservé aux Asians (indiens ou malais) ; Khayelitsha, le township des Noirs, lorsqu'il est devenu impossible de maintenir la fiction de l'absence de Noirs dans la région du Cap. Entre ces immense zones d'habitations, parfois pavillonnaires, souvent des bidonvilles, les buffer zones destinées à séparer les populations.

Nous savons, en France, qu'il n'est pas facile de convaincre les gens de vivre ensemble ; lorsque les séparer a été l'obsession du pouvoir pendant quarante ans, il n'est pas simple de réparer les dégâts...